Voici le récit d’un homme déchiré entre les Lettres parisiennes, qui le rejettent, et cette damnée terre accrochée à ses sabots, dans une langue étonnante et pure. Né en 1901 dans le Pas-de-Calais d’une famille très modeste de paysans, René Barde se sent d emblée, dans ce milieu rural, frustre mais aussi très violent, hors de « son » monde. Celui des rêves et de cet irrépressible besoin de perfection. Ami d’enfance du peintre Édouard Pignon, il se résigne à le suivre à Paris. Puis revient à la ferme parentale, repart, revient… La rugosité de ses écrits d autodidacte et ses convictions farouches lui valent la considération de Romain Rolland, Marcel Martinet, Gabriel Marcel ou Léon Chestov… mais d aucun éditeur. Refusant, jusqu’à l aliénation la moindre compromission, Barde dépeint, souvent non sans humour, la vie dans la première moitié du XXème siècle, cette France de pauvres et de besogneux, de petites frappes et de grands espoirs. Ce texte est d abord l’histoire d’une résurrection, celle d’un auteur « maudit ». Venu trop tôt ou trop tard, René Barde n’a jamais cessé d’écrire, sacrifiant tout jusqu’à la clochardisation, pour continuer à faire couler son encre. Jusqu’à sa mort en 1963, il ne sera pas publié. C’est à Bernard Collet, un garçon qui habite l’immeuble où il vit ses dernières années dans une mansarde miteuse, et avec lequel il s’est pris d amitié, qu il va confier l’ensemble de ses écrits. Collet est alors un jeune étudiant fasciné par la personnalité hors norme du vieil homme. C’est lui qui, en les découvrant, va transcrire les innombrables pages manuscrites, avec leurs ratures et leurs repentirs.