Ce texte, concocté par mes soins, fut le support d’une dictée. Si le cœur vous en dit, vous pouvez « l’administrer » à quelques amis !
Nourriture et culture sont toutes deux affaire de subsistance. Abdomen et encéphale, sollicités par des envies pareillement irrépressibles, ont besoin de vitamines, parfois jusqu’à satiété. Neurones et papilles, également alléchés par l’épice des mots ou par le sel des mets, veulent qu’on les contente.
Mais attention ! Si l’on connaît la « malbouffe » et ses conséquences, on ne se méfie pas suffisamment des ersatz culturels dont on nous gave, tels des gallinacés engraissés en batterie. La fadeur et l’insipidité guettent nos cerveaux, nos synapses et nos rachis… Mais aussi notre discernement et notre aptitude au doute, qui sont notre singularité de « roseau pensant ».
Cependant – et voilà qui nous apaisera et nous requinquera –, il existe bel et bien une prophylaxie pour l’esprit, à l’instar de la diététique pour l’estomac. Elle se compose de quelques vaccins qu’il est vital de s’inoculer : le vœu de libre arbitre, le parti pris de la curiosité, le refus des évidences et, par-dessus tout, la connaissance et l’amour des mots, avec le plus éminent respect pour ce qu’ils signifient et sous-tendent.
À défaut des antidotes précités, il ne nous resterait plus qu’à accepter, la tête basse, l’œil torve et l’intelligence en berne, d’être une meute de chiens de Pavlov ou un troupeau de moutons de Panurge. Privés du bon usage des mots, nous serions démunis, orphelins, vite refoulés vers des abysses inconnus d’où l’Homo sapiens, pendant des millénaires, s’est extirpé, à force d’obstination quasi existentielle, de volition, d’envie et d’espoir.
Eh oui ! Nos becs et nos plumes ne disposent que des mots pour affirmer, nier, décrire, convaincre, avouer, promettre, juger, témoigner… Quelle responsabilité ! Mais en retour, quel ravissement ! À l’exemple du gastronome – qui fait d’autant bonne chère qu’il sait ce qu’il déguste –, nous savourons davantage les mots, leur suc, leur miel et leur arôme (en évitant leur fiel ou leur acidité), si, au préalable, nous les avons approchés, amadoués, apprivoisés, faits nôtres et transfusés en nous-mêmes dans le sang nourricier de la pensée.
Henri Girard
Henri Girard le joaillier des mots . Un amoureux de la langue qui nous fait partager sa culture avec délice dans la plus pure simplicité .
Merci Odile. Oui, j’adore et je respecte notre langue, si belle ! Grosses bises.
Eh oui un écrivain, un vrai..
Merci, la Bunette. C’est un plaisir de se distraire avec notre belle langue ! Bises.
Sincèrement, ça fait plaisir de lire un texte d’esprit si maitrisé.
Je n’ose même plus placer un mot..
Merci pour ce moment de plaisir
sylvie
Merci Sylvie.