Chronique douce-amère, scandée, dépouillée, qui s’interroge une phrase après l’autre sur la désincarnation des individus dans une société… individualiste.
C’est d’abord une histoire de parole puisque les deux protagonistes, Leslie D et Paul K, font métier de recueillir celle d’autrui. La première travaille avec des enfants d’un quartier dit sensible, le second est journaliste radiophonique. Et tous deux sont également exposés, dans leur vie privée, au déferlement des bruissements de bouche de leurs semblables, qui souvent leur vrillent les nerfs.
Le récit installe une inquiétude diffuse. Sur la condition des « bestioles » — nous —, leur vie, leur solitude, et ce temps qui avance pendant qu’elles parlent, souvent, pour ne rien dire. Autopsie des sentiments, des émotions, des comportements de gens simples, ballottés et indécis, étonnés et blasés, enfants trop vite adultes, debout mais fragiles… vivants en somme.
Pour cet ouvrage si singulier, un autre titre eût été envisageable : La Condition humaine… Mais il était déjà pris.